25 mars 2010

L’alternative Villepin.


L’ancien Premier Ministre a annoncé ce jour, lors d’une conférence de presse, la création de son propre parti (dont le nom est encore inconnu du grand public) lequel sera officialisé le 19 juin prochain. Cette annonce, qui sonne comme un retour définitif sur le devant de la scène politique, s’inscrit surtout dans un contexte favorable pour Dominique de Villepin.

- D’une part, parce que cette déclaration intervient à peine quelques jours après le cuisant revers électoral subi par l’UMP. Une situation politique circonstanciée qui permet, de fait, à Dominique de Villepin d’apparaître devant les Français (fort de son expérience acquise, sa posture reconnue et son style singulier) comme une alternative crédible et concrète à Nicolas Sarkozy (qu’il ne cite d'ailleurs à aucun moment dans son discours). D’où les formules employées ce matin visant à s’affranchir de la politique du chef de l’Etat (« mal à l'aise dans la politique menée aujourd'hui par la majorité ») tout en discréditant de façon ostentatoire son action (parlant même d’« échec d'une stratégie »).

- D’autre part, parce que cette sortie médiatique, plutôt bien calculée en termes de calendrier, vient surtout nourrir la dynamique de proximité opérée sur le terrain depuis déjà quelques mois mais également créditer, de manière officielle et symbolique, sa démarche politique « de campagne » auprès des Français celle-ci initiée notamment par le Club Villepin et ses e-réseaux. Même s’il ne se dit pas, pour l’heure, (à l’instar de Ségolène Royal) candidat à l’élection présidentielle, Dominique de Villepin s’organise concrètement, se structure sérieusement envoyant, dès lors, un message fort aux citoyens Français mais également à l’intention des ténors de l’UMP : soit une manière personnelle de confirmer qu’il pèsera bien ces prochains mois dans le débat national.

- Enfin, parce que cette séquence solennelle permet à l’ancien Premier ministre d’incarner, au-delà d’une certaine et paradoxale nouveauté sur le « marché », un élan d’espoir, d’optimisme et de changement (éternelles promesses d’un présidentiable) à un moment clé où la politique française traverse une crise profonde laquelle s’illustre notamment par le taux record d’abstention, fruit de la « défiance » et de « l’exaspération » des Français à l’égard de ses dirigeants. Aussi, lancer un parti nouveau (et non un nouveau parti) « libre, indépendant [et] ouvert à tous » a du sens aujourd’hui dès lors que celui-ci propose, dans son système organisationnel et son cadre relationnel, un lien différent (direct, modernisé, impliqué, intégré donc valorisé) avec les Français. L’exemple de la campagne d’Obama, largement décryptée a posteriori, où le citoyen devient acteur devrait pouvoir lui indiquer la voie à suivre. La politique doit être réinventée. Dominique de Villepin en a l’opportunité.

Pour finir, soulignons, lors de cette conférence de presse, le style de Dominique de Villepin ancré dans une posture d’homme d’Etat et une dimension tout à fait gaullienne (dans le choix des mots et des symboles) avec cette volonté de « servir [avant tout] la République, la France » et de rassembler « au-dessus des clivages ». Qu’on se le dise, Dominique de Villepin est entré activement en campagne en imposant son calendrier et son rythme médiatique. Pour l’heure, seul le nom de son parti reste en suspens… Aussi, je me propose d’être, à nouveau, force de propositions. Affaire à suivre donc sur ce blog. François B.

22 mars 2010

Ségolène. Toujours une image d’avance.


Dimanche soir, Ségolène Royal a gagné 2 batailles précieuses : la première, évidente, qui relève de la politique et la seconde plus subtile qui concerne l’image. Il y a, d’une part, cette large victoire (60,61% vs 39,39% pour Dominique Bussereau) dans la région Poitou Charentes qui place, à nouveau, l’ex candidate dans une posture crédible et légitime en vue de la présidentielle de 2012. En plus d’être la deuxième présidente de région la mieux élue (après Martin Malvy en Midi Pyrénées), Ségolène vient, à l’appui de son bilan et son style si singulier, de valider en effet une méthode personnelle (construite sur les alliances politiques) mais également de confirmer auprès de l’opinion sa stratégie qui s’appuie essentiellement sur un ancrage local empreint d’écoute et de proximité (cf : les séquences Heuliez et Xynthia) loin des polémiques partisanes et des logiques d’appareils. On l’a disait définitivement « seule » et désormais « distancée ». Au grand dam de la rue de Solférino et de ses cadres, là voilà aujourd’hui relancée avec de nouvelles perspectives naturellement nationales. Et d’avancer qu’il faudra compter de nouveau sur elle en vue des primaires internes (« Notre capacité de résistance a été reconnue » dira-t-elle).

D’autre part, il y a cette déclaration de l’ex candidate faite publiquement juste après l’annonce officielle des résultats du scrutin. Une nouvelle fois, c’est bien la scénarisation et la forme qui retiendront toute mon attention. En devançant dimanche soir Martine Aubry d’une manière si intentionnelle, Ségolène Royal a créé, une nouvelle fois, l’événement en incarnant, la première (à l’écran), la victoire de la gauche (celle-ci même illustrée par son score record) personnifiant, par là même, le retour de l’opposition sur le devant de la scène politique : soit une première intervention d’autant plus impactante qu’elle sera exposée à une heure capitale de grande audience. En imposant (encore) son rythme médiatique (comme au second tour de la présidentielle 2007 – intervention la première à 20h02 tel le vainqueur), Ségolène s’est surtout positionnée comme la (vraie et seule) porte-parole de la gauche qui gagne. A ce titre, les formules finement choisies lors de son intervention sont intéressantes : « C’est une belle victoire des présidents de région de gauche et de leurs équipes » lancera-t-elle à son pupitre. Endossant, le temps d’un discours, le costume de numéro 1 du parti en lieu et place de la maire de Lille, Ségolène Royal s’affirmera, à l’appui d’un discours de leader, comme la véritable patronne tout en restant au dessus du PS. Jamais dans son allocution, elle ne prononcera en effet le mot « socialiste » ni même le nom de « Martine Aubry », comme pour mieux minimiser le rôle de l’actuelle première secrétaire (légitimée dès lors à la tête du parti) dans ce triomphe électoral : « Cette victoire n’appartient pas à un camp mais à tout le pays » rajoutera-t-elle.

Dans une démarche, de fait, prospective, l’ex candidate finira, dans son discours, par s’inscrire de nouveau comme la principale opposante à Nicolas Sarkozy (« Nicolas Sarkozy doit comprendre que sa politique épuise la France »), une posture qui devrait, d’ailleurs, s’intensifier ces prochaines semaines. Passionnant donc. Pour finir et pour l’anecdote, je partage avec vous le commentaire de Dominique Bussereau au soir du second tour qui montre l’aura de la présidente de région. Et qui, en meme temps, m’a fait sourire. « Face à une star, une idole, nous n’avons pas fait un si mauvais score ». A continuer de suivre avec attention. François B.

12 mars 2010

La com' peut-elle enrayer l’abstention ?



La presse, une nouvelle fois alarmante sur ce sujet électoral désormais récurrent, prévoit au soir du premier tour des régionales (chiffres prévisionnels à l’appui), une abstention record avoisinant les 50% : un chiffre certes inquiétant en première lecture mais qui, paradoxalement, est loin de constituer une surprise en soi tant les élections, de manière générale, ne passionnent pas les Français. Définitivement. Mis à part la dernière présidentielle, différente de par l’importance de son enjeu, sa forte exposition médiatique et sa personnalisation à outrance, les dernières campagnes (à l’image de l’abstention record - 59,3% -, là aussi, des européennes) ont, hélas, montré et maintenant bien confirmé un désintérêt profond (voire un mépris) des Français à l’égard du jeu et de la classe politique. Dès lors, quels que soient la teneur de la consultation et le résultat à la sortie des urnes, le dénouement (un tantinet fataliste suis-je tenté d’ajouter) est connu de tous : l’abstention sort toujours vainqueur du scrutin. C’est ainsi. So what ? Les mêmes causes produisant les mêmes effets, les séquences électorales passent donc les unes après les autres sans que les instances politiques ne se penchent véritablement sur le fond du problème. Pourtant cette indifférence électorale, quasi aboulique, peut s’expliquer, en France, à la fois par le fond et la forme même de nos campagnes :

- Premièrement, le fond c'est-à-dire les idées, les thématiques, en somme tout ce qui devrait nourrir le débat et rendre l’échange avec les Français passionnant, ces derniers étant en quête de réponses (tout du moins de propositions) à leurs préoccupations du quotidien. Si l’on revient à ces régionales, que retient-on ? Interrogeons les citoyens sur les sujets qui les ont marqué ? Que disent-ils ? C’est la première raison de ce désamour politique et donc de l’abstention de dimanche prochain : cette campagne a été simplement vide de sens. La nature ayant, par essence, horreur du vide, cette séquence a été en effet marquée par les seules querelles de pouvoirs et/ou de personnes qui, au pire, désespèrent les Français, au mieux, les amusent mais qui, de toute évidence, ne les aident pas à s’intéresser à la vie de leur cité. Non franchement pas. Dans ce contexte, difficile donc d’identifier les enjeux réels d’un tel scrutin et de comprendre, par conséquent, l’importance du vote le jour J.

- Deuxièmement, la forme c’est-à-dire les supports qui aident à faire connaître le candidat et sa personnalité, à renseigner sur son programme, sa ligne idéologique et plus largement sur sa vision de la société et du monde. Quels sont donc, à date, les moyens de communication utilisés pour servir l’homme et ses idées ? Entre archaïsme et pseudo modernisme, il y a d’une part les affiches et tracts de campagne aussi inutiles que dépassés et d’autre part les réseaux sociaux (principalement facebook et twitter) qui, hélas, sont plus devenus des journaux de campagne que des lieux d’échange (en passant, je préférerai lire sur facebook « Que pensez-vous de cette idée sur le logement… ? » que « Hier, j’étais sur TF1… Tout à l’heure sur Canal +.. etc…»). Dès lors, une question plus générale se pose. Pourquoi, dans un souci démocratique dit-on, avoir privé le candidat d’utiliser tout support commercial publicitaire trois mois avant une élection et ainsi avoir limité sa communication à ces affiches officielles et à ces professions de foi eux aussi vide de sens ? Par extension, pourquoi ne laisser qu’aux seuls médias, à l’appui de leurs enquêtes et sondages quotidiens, l’exclusivité de construire l’opinion avec les risques partisans que cela induit ?

Aujourd’hui, il est temps pour le candidat d’être enfin libre de l’affectation de ses moyens d’expression pour que le citoyen électeur puisse mieux comprendre, pour mieux choisir devant l’homogénéité du linéaire politique. Par conséquent, il convient d’adapter davantage la réglementation de l’actuelle communication politique pour que celle-ci, plus moderne et plus flexible, puisse permettre, dans sa vulgarisation, d’expliquer les grands enjeux politiques, économiques et sociaux et ainsi susciter l’intérêt puis la mobilisation et donc, par extension, limiter l’abstention. Frédéric Maillard a initié le mouvement. A l’appui de mon ouvrage, j’ai aussi milité pour cette libéralisation de la communication politique, elle-même relayée actuellement par Nicolas Bordas dans les médias et sur le web, et ce d’une manière active. Plus que jamais le débat est lancé et le moment propice pour bouger. Non, la communication n’enrayera pas l’abstention. En revanche, elle saura la limiter, la freiner. Alors essayons. Souvent hostiles à cette « publicitarisation » de la politique (disent-ils), nos dirigeants seraient les premiers surpris. Alors chiche ? François B.