25 mars 2011

Contre l'abstention : la publicité politique ?


En appliquant et adaptant à la politique les méthodes de la communication et de la publicité, l’homme politique a fini, à l’appui notamment des médias et des sondages, par devenir une « marque » à part entière, laquelle, comme les produits de grande consommation, peut se distinguer aujourd’hui par sa recherche constante d’attractivité pour séduire et ainsi gagner l’adhésion des citoyens devenus « consommateurs ».

Intégrant notamment dans son mix produit les notions d’ « image », d’ « identité » et de « positionnement », l’homme politique moderne, tel Sarkozy, Royal, DSK ou encore Le Pen, s’est en effet inscrit dans une logique décomplexée de marketing total dont l’objectif assumé vise à ancrer son « nom » dans l’inconscient collectif, autrement dit imposer « sa marque » pour devenir, à terme, par sa seule force d’évocation, le référent au moment de l’acte d’achat, soit lors du passage de l’électeur dans l’isoloir.
Les hommes politique, des marques comme les autres

Les hommes politiques étant devenus finalement des « marques » comme les autres, comment expliquer alors, dans ce cadre analogique, le peu de moyens accordés aux principaux intéressés pour exposer, à l’instar des marques commerciales, leurs produits : c'est-à-dire leurs personnalités, lignes programmatiques, idéologies, visions de la société ou plus largement du monde dans lequel nous vivons ?

Aussi, pourquoi, dans un souci démocratique dit-on, avoir privé le candidat (depuis la loi du 15 janvier 1990 qui interdit simplement toute communication pendant les trois mois précédant le premier jour d’une élection et jusqu’à la date du tour de scrutin) d’utiliser tout support commercial publicitaire et ainsi avoir limité sa communication aux seules émissions électorales, aux affiches officielles d’un archaïsme reconnu ou aux professions de foi vides de sens ?

Par extension, pourquoi ne laisser qu’aux seuls médias, à l’appui de leurs enquêtes et sondages quotidiens, l’exclusivité de construire l’opinion avec les risques partisans que cela induit ? Aujourd’hui, il est temps pour le candidat d’être enfin libre de l’affectation de ses moyens d’expression pour que le citoyen électeur puisse mieux comprendre et mieux choisir devant l’homogénéité du linéaire politique.
Adapter la réglementation

Par conséquent et de toute évidence, il convient d’adapter davantage la réglementation de l’actuelle communication politique pour que celle-ci, plus moderne, flexible et souple, puisse permettre, dans sa vulgarisation, d’expliquer les grands enjeux politiques, économiques et sociaux et ainsi susciter l’intérêt puis la mobilisation. Et, par extension, limiter l’abstention.

Tout comme pour les élections européennes, l’intérêt porté à l’élection cantonale a été significatif. A un an de l’élection présidentielle, plus que jamais le débat est lancé. Non, la communication n’enrayera pas l’abstention. En revanche, elle saura la limiter tout du moins la freiner. Souvent hostiles à cette « publicitarisation » de la politique, nos dirigeants seraient les premiers surpris. A bon entendeur.

10 mars 2011

La marque "Le Pen" passée au crible !



L’état des lieux.

« La marque alternative ».

Annoncée par les spécialistes, au soir du 1er tour de l’élection présidentielle de 2007, pourtant au terme de son cycle de vie, la marque « Le Pen » aura donc su gérer, avec une rare dextérité, sa phase de déclin en réussissant non seulement à maintenir, sur le marché électoral, la pérennité de son offre mais également à se relancer, de manière tactique, pour devenir aujourd’hui l’une des « griffes » les plus attractives aux yeux des « conso électeurs ». Etrange paradoxe que celui de cette « marque politique », historiquement la plus ancienne du marché, qui est donc, à l’appui du dernier sondage Louis Harris, désormais aussi une marque « en devenir » (!). Bénéficiant du pouvoir d’évocations naturelles de son « patronyme » et de son impact dans l’esprit des Français, Marine Le Pen a su surtout, depuis 2007, marquer une évolution voire une vraie rupture préférant en effet le style et le sourire féminins aux provocations viriles et inutiles de son père. Elle présente ainsi, à l’appui d’un « packaging produit » résolument plus moderne, l’image d’une offre dans l’air du temps, susceptible d'être intéressante donc plus acceptable. Marine Le Pen a en effet réussi à « démarginaliser » le vote « FN » en faisant de celui-ci un vote de « la colère » plutôt qu’un vote cristallisant « la haine et les peurs ». Toutefois, l’ascension spectaculaire de Marine Le Pen s’explique surtout à droite, par le rejet, la déception et l’impopularité de Nicolas Sarkozy, et à gauche, par le manque de projet commun et l’absence manifeste de candidat tout du moins de leadership, lesquels cumulés rendent de fait le « FN » comme une offre politique lisible, donc digne d'intérêt, avec une ligne programmatique claire et un positionnement lui aussi facilement identifiable : soit celui de « l'anti système » et de « l’alternative » crédible et désormais possible au regard des dernières intentions de votes.

L’enjeu.
« Gagner en présidentiabilité ».

Incarnant, de toute évidence, une réelle rupture dans l’offre politique française, l’intention de vote « Le Pen » devenue Marine doit, toutefois, être considérée davantage comme un vote « par défaut » qu’un vote « d’adhésion » tant la présidente du FN rassemble sur son nom d’abord les déçus de la politique, les français se sentant en effet de plus en plus « coupés » de leur élites. Idéalement placée dans les intentions de vote à 14 mois seulement de l’élection présidentielle, Marine Le Pen doit pouvoir maintenant dépasser la posture de « rebelle », de « vote contre » et donc aller au-delà du positionnement historique de son père. Ce qui met, selon moi, la leader frontiste devant un double enjeu : d’une part, nourrir le positionnement du candidat « du neuf » et « du côté du peuple » en priorisant son action sur le seul quotidien des Français ; d’autre part, crédibiliser non pas sa présence au second tour (puisque celle-ci est pour l'heure envisageable) mais la possibilité d’une gouvernance « Le Pen » et donc transformer le « vote FN » en « vote pour ». Chose fort improbable dans les faits mais jouable dans la construction de l’image « perçue ». Aussi, pour prouver qu’une « autre politique » est possible, Marine Le Pen devra pouvoir franchir un nouveau cap, mettre en avant ses capacités personnelles mais également les compétences de son équipe (!). La perspective d’un 21 avril, à l’envers ou pas, est-elle possible en 2011 ? Ce scénario n'est en tous cas plus inenvisageable. Quoi qu’il en soit, le « conso électeur », d’abord réservé puis curieux, approche désormais le produit « Le Pen » sans retenue, l’observe et le repose en pensant que lorsque le jour viendra, il pourrait peut-être bien le choisir dans sa liste de course. Les responsables du linéaire sont d’ores et déjà prévenus. Il conviendra donc de réagir. Vite. Et en amont.
Belley

2 mars 2011

Mélenchon et "le syndrome Guignol".


Etat des lieux.
« L’offre hors linéaire ».

3 ans ! Voilà donc le temps record qu’aura mis le produit « Mélenchon », à l’appui d’une stratégie de communication bien ficelée, pour passer de l’ombre socialiste à la lumière médiatique qui l’éclaire désormais (depuis maintenant 2008 et son départ du PS) et le rend aujourd’hui visible dans les « linéaires ». Compte tenu de ses expériences passées au poste de sénateur, député et même ministre (!), c’est aussi le peu de temps qu’il aura fallu au leader du Parti de Gauche pour s’affranchir habilement du « système », se façonner logiquement une nouvelle image et se construire une véritable « identité », nécessaire pour exister dans l’esprit du grand public. Car celui, qui s’attache, de façon régulière donc méthodique, à créer l’événement autour de lui pour s’offrir une couverture maximale, a fini en effet par s’approprier un territoire de marque spécifique, celui de la « révolte », de la « colère » ou encore de « l’indignation » permanente : soit une force d’évocations qui, en vue de 2012, lui permet de se positionner, à la gauche de la gauche, comme le seul candidat « rebelle » et « anti-système ». Dès lors, chez Jean-Luc Mélenchon, tout est fait à la fois pour nourrir un peu plus l’image du résistant « seul contre tous » (et donc incarner logiquement la promesse de son parti : « faire front ») et pour amplifier, par ailleurs, sa visibilité, le produit étant rappelons le toujours en quête de notoriété. D’abord, sa posture physique, toujours soigneusement agressive, laquelle est symboliquement bien illustrée par le « doigt pointé » devenu depuis « son » signe distinctif. Ensuite, ses répliques chocs et imagées, lesquelles visent moins à « clouer le bec » de ses interlocuteurs que marquer les esprits pour être massivement reprises des médias. Enfin, ses cibles privilégiées « politiques, journalistes et autres banquiers », auxquels il conseille naturellement (cf : titre de son dernier ouvrage) de « tous s’en aller ». Soit, en définitive, un style direct à la fois en rupture avec l’offre politique existante et en phase avec la conjoncture de crise actuelle, ce qui rend, par conséquent, ce nouveau produit, à la vue tout du moins de son packaging, forcément attractif.

L’enjeu.
« Eviter le syndrome Guignol ».

A la veille « du grand soir » de sa première campagne présidentielle, Jean-Luc Mélenchon a donc réussi l’une des étapes les plus difficiles pourtant de la construction de l’offre politique, celle qui consiste à trouver pour le candidat un positionnement à la fois différenciant, identifiable et crédible. Passé ce premier socle dit « marketing » nécessaire mais pas suffisant, le leader du Parti de gauche doit pouvoir maintenant, tout en conservant bien sûr sa spécificité de « marque » (c’est-à-dire son « parler vrai »), donner davantage de relief à son action et sa communication. Autrement dit, opter pour une tonalité plus mesurée afin d’être à terme plus audible, le positionnement de « révolté permanent » me paraissant en effet difficilement tenable dans la durée. Finalement, le risque pour Mélenchon est que la forme ne vienne tout simplement cannibaliser le fond. En d’autres termes, que son personnage, caricatural en soi, ne dépasse les traits déjà bien accentués de sa marionnette. C’est ce que j’appelle « le syndrome Guignol » qu’il doit absolument éviter s’il veut vite trouver un écho dans l’opinion, gagner en crédibilité puis rafler des parts de marché. Pour ce faire, il convient pour Mélenchon de relever un nouveau défi, lequel vise à « dé-conceptualiser » ou plutôt à clarifier, suis-je tenté d’écrire, la notion de « révolte » mise en avant en permanence. Est donc venu en effet le temps des propositions fortes et novatrices lesquelles doivent maintenant être préférées aux « coups de gueule », certes « spectaculaires » et générateurs de « buzz », mais qui ne peuvent rythmer et structurer le discours d’un présidentiable crédible. Compte tenu de la crise, de la gronde latente dans le pays et de l’impopularité de l’actuelle gouvernance, « la gauche de la gauche » constitue un créneau politique porteur si tant est que la promesse de « changement », comme fil rouge du « front de gauche », soit maintenant « supportée » (comme on le dit dans la publicité) c'est-à-dire prouvée par des éléments tangibles donc des idées fortes et innovantes illustrant l’élan d’une « gauche » nouvelle, authentique et... à nouveau crédible. Affaire à suivre. Belley.