Que révèle la crise à l'UMP ? «20 Minutes» a demandé à un publicitaire...
Treizième
jour de crise à l’UMP, avec la séparation actée des camps des deux
anciens candidats à la présidence du parti. L’élection de Jean-François
Copé est toujours contestée, alors que François Fillon a créé un groupe
dissident de l’UMP à l’Assemblée nationale. Une guerre qui laisse des
traces, les cotes de popularité des deux responsables politiques étant
en chute libre. Quelle image les deux hommes ont-ils aux yeux des
Français? Quelle place pour Nicolas Sarkozy?
20 Minutes a demandé à François Belley, publicitaire et auteur de
Ségolène la femme marque, sa vision de la crise.
Deux hommes, deux ambitions, un vote contesté pour la tête du parti...
Que révèle cette crise à l’UMP?
Une remarque générale tout d’abord. Cette crise, c’est un peu la
crise des trois «p». Crise du politique, du parti, de la primaire. La
première remise en question est celle du politique. L’image de ces
derniers est «abîmée», à cause, notamment, d’une ultrapersonnalisation
qui frise le narcissisme maladif dans le cas de Jean-François Copé et
François Fillon.
La deuxième remise en question est la perte de légitimité et le
manque de confiance dans le parti politique. Ce n’est pas nouveau, mais
elle apparaît de manière aigue dans cette crise. La troisième remise en
question, c’est cette histoire de primaire, qui a été vendue comme un
exercice démocratique tant par l’UMP, que le PS en 2008 ou
Europe-Ecologie les Verts en 2011.
A chaque fois, l’exercice de cette primaire s’est révélé
contre-productif et polémique. Ces élections internes semblent être des
machines à s’auto-détruire.
Les sondages tendent à révéler que François Fillon bénéficie d’une meilleure image que Jean-François Copé…
Je dirais plutôt que c’est un match nul entre eux deux. Ils incarnent
tous deux l’image de la défaite et de la division, alors que la
politique porte en elle le projet de victoire, de rassemblement et
d’avenir optimiste.
L’un et l’autre ont donc, de manière égale, une image négative?
Tout deux en tout cas apparaissent comme une caricature de l’homme
politique, qui recherche à tout prix le pouvoir, quitte à faire des
magouilles. Ils semblent empêtrés dans une guerre d’égos. C’est une très
mauvaise publicité qui dégoûte le public par sa tournure
«politique-spectacle». En termes de sondages, la popularité de François
Fillon semble mieux résister que celle de Jean-François Copé, mais ce
dernier semble plus soutenu par les adhérents UMP. Mais pour le moment,
tout cela ne veut pas dire qu’en grand-chose. Mais les dégâts sont
grands, tant pour eux que pour leur parti.
Dans cette crise, y a-t-il une rupture de l’image de François Fillon et de Jean-François Copé?
Cela dépend de la personne. Pour Jean-François Copé, qui a promu la
«droite décomplexée» pendant sa campagne, il se montre aujourd’hui dur,
inflexible, presque rigide. Il y a une continuité dans son image, même
s’il paie «cash» ce style. Pour François Fillon, il y a au contraire une
rupture. Alors qu’il apparaissait auparavant comme un homme consensuel,
plutôt doux, cette crise le révèle sous un nouveau jour. Il n’apparaît
plus ni dans le rassemblement, l’éthique ou la dynamique positive en
créant un groupe parlementaire dissident. Il paie cette rupture d’image.
Par ailleurs, plus la crise est longue, plus l’image des deux hommes
devient négative et plus il leur sera difficile de remonter la pente.
Quant à Nicolas Sarkozy qui reste en coulisses, en déjeunant avec Fillon puis Copé, quelle image se façonne-t-il?
En adoptant cette stratégie du silence, alors qu’il a été attaqué
pour son omniprésence médiatique pendant son quinquennat, il marque un
point. Son image se renforce d’autant plus que le président François
Hollande est de plus en plus attaqué. Pendant cette crise, il se grandit
et gagne en légitimité, ce qui pourrait favoriser son retour en
politique. Mais n’est est écrit ici.
Mais sa médiation entre Copé et Fillon pour un nouveau référendum semble avoir échoué cette semaine…
C’est une autre chose. Alors que François Fillon et Jean-François Copé perdent en «leadership»,
Nicolas Sarkozy
aurait pu apparaître comme sifflant la fin de la partie, avant
d’organiser une belle photo de la réconciliation. Cela n’a pas été le
cas, l’ancien président n’étant peut-être plus aussi écouté
qu’auparavant par les deux hommes. Néanmoins, aux yeux des Français,
cette stratégie du silence le renforce, car il prend le contrepied de ce
que l’on aurait pu attendre de lui.
Propos recueillis par Anne-Laëtitia Béraud