31 janvier 2012

"Les candidats sont-ils des marques ?"


Ci-dessous une interview diffusée ce matin sur France Culture dans le cadre de l'émission "Chemins de campagne". Le sujet de l'émission était : "les candidats sont-ils des marques ?" Je reviendrai sur ce blog cette semaine pour écrire une note sur le sujet, en complément de l'interview. Pour des infos sur le sujet, je vous renvoie naturellement à mon ouvrage " Ségolène, la femme marque ". @+

http://www.franceculture.fr/emission-les-chemins-de-campagne-les-candidats-sont-ils-des-marques-2012-01-31

29 janvier 2012

Les mots n'ont plus de sens.

Je profite du conseil national de l’UMP (hier soir Porte de Versailles) pour revenir sur 2 notions clés omniprésentes dans l’actuelle campagne présidentielle :

- La première est celle de la « résistance », si chère à l’Histoire de France et force évidente d’évocations dans l’électorat. Contexte de crise et défiance politique obligent, le terme est aujourd’hui massivement repris par quasi l’ensemble des candidats à l’élection présidentielle, à commencer légitimement par Jean-Luc Mélenchon du front de gauche qui, en s’appuyant sur la révolte, la colère ou encore l’indignation permanente, a su nourrir l’image du candidat résistant « seul contre tous » et donc incarner la promesse de son parti : « faire front ».

Avec son slogan de campagne « Un pays uni, rien ne lui résiste », François Bayrou a lui aussi endossé habilement le costume de « résistant » appelant (dans son meeting du 18/01 dernier à Dunkerque) « à faire rimer le nom de France avec le beau mot de résistance ». Et de « résister » respectivement à « l'enlisement, à l’appauvrissement, à la fuite des activités, aux compromissions, aux privilèges excessifs et indus, à l'illettrisme, à l’'argent roi, à l'affaiblissement ». Candidate du parti démocrate dont le slogan de campagne est « résister, transmettre, construire », Christine Boutin l’accusera même de plagiat tout comme Marine Le Pen.

Plus surprenant, c’est de retrouver cette même notion dans la rhétorique du camp actuellement au pouvoir, plus précisément hier dans le discours de Jean-François Copé, lequel appelait à « garder toujours intact l’esprit de résistance ». Aussi, quel que soit l’objet de cette « résistance » (sarkozysme, crise, mondialisme, finance, sondage etc…), force est de constater que ce terme, utilisé par tous, est aujourd’hui plus que jamais galvaudé. Il est donc temps pour les candidats de s’interroger sur la signification et le réel impact de cette notion dans l’électorat quitte à la revoir pour s’approprier une nouvelle rhétorique plus adhoc, c’est-à-dire nouvelle et surtout plus en cohérence avec le positionnement politique du candidat.








- La seconde est celle de « l’anti système » dont le positionnement se retrouve, dans l’actuelle campagne, totalement banalisé et, pour tout dire, vide de sens. Pour se différencier dans l’offre politique, rien n’est plus tendance en effet que de se déclarer aujourd’hui « candidat anti-système ». Mais au fond, de quel « système » s’agit-il ? Sur le marché politique, le Front National s’est toujours historiquement positionné comme tel, c’est-à-dire contre l’ensemble des élites politiques en s’adressant (quasi exclusivement) à une cible « d’exclus et de sans grade».

Faisant parti un temps de ces dites élites, François Bayrou est contraint quant à lui de faire une toute autre interprétation en s'opposant fermement à la bipolarité de la politique française, le système étant représenté dans ce cas par l’UMP et le PS dans son alternance (sa contraction UMPS même par moment). Membre du Parti Socialiste pendant plus de 30 ans (!), JL Mélenchon se positionne également comme le candidat de l’anti-système, ses cibles privilégiés étant pour sa part essentiellement les « politiques, journalistes et autres banquiers », auxquels il conseille simplement cf : titre de son dernier ouvrage) de « tous s’en aller ».

Vous l’aurez compris, l’anti-système (à l'encontre tantôt des élites, tantôt des politiques, des médias, de la finance ou encore des sondeurs…) est un terme porteur car il s’inscrit plus que jamais dans un contexte de crise, d’attente de « changement » et de désir profond de faire de la politique autrement. Mais là encore quid de son sens et de sa réelle signification eu égard au positionnement similaire de la concurrence ?

Veuillez installer Flash Player pour lire la vidéo

28 janvier 2012

Décryptage W/C 23 janvier.


L’ image de la semaine,
Revient à la « présidentiabilité » enfin révélée de François Hollande lors de son débat sur France 2 avec Alain Juppé. Annoncé comme le challenger, le leader socialiste était celui qui avait le plus à gagner. Il a, par sa prestation, confirmé sa bonne dynamique actuelle :

- D’abord, sur la forme, Hollande a réussi à tirer le meilleur parti de la caméra : regard, sourire, émotion et même une dose d’humour (maîtrisée) faisant rire à 2 reprises le public sur le plateau. Pourtant plus expérimenté, Juppé est apparu quant à lui nerveux, susceptible, arrogant, parfois même agressif, signes au fond qu’il n’était pas maître de lui-même.

- Ensuite, Hollande a réussi à imposer un style loin d’un homme et d’une gauche molles. Il ne fut pas (comme beaucoup l’attendaient) le « maillon faible » et la victime de Juppé. Vif, sûr de lui, concret, Hollande s’est installé dans une posture de futur Président aidé, il est vrai, par son interlocuteur ayant déjà presque accepté étrangement une victoire de la gauche « Il y a des erreurs, j’espère que vous les corrigerez » , « On verra ce que vous ferez » dira Juppé au cours du débat.

- Enfin, plus que le débat en lui-même, c’est l’interprétation immédiate post débat qui a bénéficié largement à François Hollande, contribué fortement à nourrir sa crédibilité et donc a renforcé sa stature présidentielle. Selon moi, cette séquence médiatique constitue plus que jamais un temps fort majeur de sa campagne.




La formule de la semaine,
revient incontestablement à Nicolas Sarkozy (avec cette fausse confidence « C’est la première fois de ma vie que je me retrouve en situation d’envisager la fin de ma carrière ») qui nous rappelle, au passage, sa maîtrise du « off » et son sens avisé de la communication. Selon moi, cette formule franchement inattendue, de la part d’un politique stratège comme Nicolas Sarkozy, est - pour le coup - tout sauf un hasard :

- D’une part, parce qu’elle intervient en pleine dynamique médiatico politique de son principal rival, François Hollande, plus que jamais sous les feux de la rampe depuis son discours réussi du Bourget ;

- D’autre part, parce qu’en jouant clairement sur l’affect de l’électorat, elle humanise un Président en perte de vitesse dans les intentions de votes créant de fait une certaine empathie autour de l’homme qu’il est avant tout ;

- Enfin, parce qu’elle installe subtilement l’éventualité d’un « après Sarko » dans un contexte de crise sans précédent exigeant plus que jamais à la fois pugnacité, volontarisme et présidentiabilité, soit justement les 3 forces du Président actuel.

L’idée donc de regret et son corollaire « bon après tout, il n’était pas si mal » permettent d’intégrer une dimension émotionnelle à quelques jours d’une sortie médiatique "cruciale", ce Dimanche, qui devrait (à l’appui de mesures fortes, « révolutionnaires » dit-on même) montrer un Président en campagne, pragmatique, déterminé et sûr de son destin. A suivre.



Le conseil de la semaine,
Pourrait être gracieusement donné à Nicolas Sarkozy qui tarde (trop ! suis-je même tenté de rajouter) à se déclarer candidat dans un contexte où Hollande, déjà bien en avance dans les sondages, tend à occuper de plus en plus l’espace et à donner le tempo de la campagne.

Jusque-là, les Français étaient habitués à voir en Sarko un éternel candidat, adepte du « faire » omniprésent sur tous les fronts à la fois sur le terrain et dans les médias. L’initiative, le volontarisme, l’action faisaient de ce triptyque la valeur ajoutée de la marque Sarko, son positionnement. Il est aujourd’hui plus que jamais Président en pleine campagne. Etrange paradoxe.

Il est temps maintenant qu’il se lance dans l’arène de la campagne, puisque les Français le préfèrent apparemment plus candidat que Président. Dimanche devrait être le point d’ancrage de sa campagne.

20 janvier 2012

C'est que de la com' !

Avec son lot plus ou moins réussi de slogans, formules, meeting et autres débats télévisuels, la présidentielle de 2012 a bel et bien démarré. Aussi, je profite de cette dynamique médiatico politique pour vous proposer bientôt sur ce blog un décryptage hebdomadaire de la campagne, et ce toujours sous le prisme de la communication et du marketing.

Chaque vendredi en effet, je reviendrai sur les temps forts de la semaine en analysant, à l’appui d’1 image, d’1 formule et d’1 conseil, les prises de paroles, la mise en scène, l’image et le style des différents candidats. Premier rendez-vous d’une longue série : vendredi 27 janvier prochain. D'ici là, n'oubliez pas, tout çà, "c'est que de la com !".

17 janvier 2012

Interview "France Culture".


Ci-dessous le lien d'une interview donnée à France Culture dans l'émission "Chemins de campagne" sur l'axe du "changement" en campagne électorale. Une interview qui vient dans la dynamique de mon précédent billet posté ce week end. Belley.

http://www.franceculture.fr/player/reecouter?play=4369431

14 janvier 2012

L’axe « tarte à la crème » du changement.


A J-99 du premier tour des élections présidentielles, les candidats en lice commencent à dévoiler peu à peu leur slogan de campagne, lequel est censé les positionner au mieux sur le marché politique (à l’appui d’une formule claire, courte et cohérente (les 3C)) et ainsi traduire respectivement leurs promesses de marque. Avec « Le changement, c’est maintenant », François Hollande choisi donc l’axe stratégique du "changement" lequel, avec le « rassemblement », « la nouveauté » et le « continuité », appartient au carré sémantique désormais classique des campagnes électorales.

Un axe peu risqué, peu créatif mais à la fois attendu et cohérent :
- attendu, parce que, dans un contexte a priori d’alternance, c’est depuis longtemps la promesse de base face au candidat sortant, rappelons en effet, les slogans de Royal 2007 (Pour que ça change fort), Jospin 1995 (Le président du vrai changement) et plus récemment Obama 2008 (Yes We Can I change) ;
- cohérent, parce qu’il tend à s’inscrire dans un contexte politique (Présidence Sarkozy + 17 ans de présidence de droite) et économique (attente d’une alternative plus qu’une alternance) précis.

Mot magique des campagnes électorales, le "changement" doit maintenant être nourri et soutenu par le candidat à l'appui d'idées, de prises de positions et d'une vision claire. Maintenant, c'est tout l'enjeu du candidat socialiste pour ne pas faire de son "cri de guerre" une coquille vide. Bien qu’elle fasse un peu « promo grande distrib » voire « soldes », la notion que je trouve la plus intéressante du slogan reste, selon moi, l’idée d’urgence. C’est maintenant ou jamais faut-il en effet comprendre en filigrane. Ainsi, François Hollande donne rendez-vous aux Français et à l’Histoire se conférant une dimension intéressante d’homme de la situation, et par extension une posture présidentielle. Si j’avais opté pour l’axe du changement, je me serai, d’un point de vue stratégique, amusé à détourner le slogan de Sarkozy version 2007 « Ensemble tout devient possible » avec une formule du genre « le changement enfin possible » renvoyant son adversaire à son bilan et sa promesse de rupture tranquille non tenue. Ex nihilo, c’est la perception de « d’homme et de gauche molle » que j’aurai essayé de balayer en essayant d’introduire (dans 1 formule surtout plus adhoc) du dynamisme (avec des verbes d’action de type « Croire », « Avancer » etc…) et de la détermination. A mon sens, l’actuel slogan de Hollande ne fait pas le job. Applicable à tous, cette formule ne met pas en avant la valeur ajoutée du candidat et ne dit rien sur lui. Comme slogan de campagne, j’aime bien, à titre de référence, la formule de Barre en 1988 avec son « du sérieux, du solide, du vrai » qui renvoyait de facto à son expertise et son expérience à l'époque reconnues de tous.

Quant au slogan du challenger Bayrou « Un pays uni, rien ne lui résiste », je le trouve intéressant pour 2 raisons :
- d’une part, parce que l’axe du « rassemblement » colle bien au positionnement centriste du leader du Modem (lequel s’inscrit au delà du clivage droite-gauche) et à sa posture de « résistant » face au système ;
-d’autre part, parce que cette formule a le mérite de garder une cohérence et une continuité avec celle de 2007 (pour rappel son slogan était « La France de toutes nos forces) ;

Enfin et pour finir, si un slogan devait avoir des accents Mitterrandiens, ce n’est, selon moi, pas celui de François Hollande (avec sa pseudo et lointaine référence de l'ouvrage de Mitterrand paru en 1980 intitulé « Ici et maintenant) mais celui de François Bayrou. En effet, « Un pays uni, rien ne lui résiste » me semble être un mix intelligent entre « la force tranquille » de 1981 et « La France unie » de 1988 où nous pouvons en effet retrouver les mêmes notions de « force » et de « rassemblement ».Comme Mitterrand en 1981, François Bayrou se présentera devant les Français pour la troisième fois. De là maintenant à voir des signes... Belley.

Lien de mon interview cette semaine dans L'express sur ce sujet
http://www.lexpress.fr/actualite/politique/le-slogan-de-hollande-est-il-hollandais_1070406.html

Lien de mon interview cette semaine à la radio RCF
Journal RCF matinEdition du jeudi 13 janvier