5 octobre 2009

Le « style » Merkel ou « l’anti marketing » comme positionnement marketing.


Angela Merkel a donc été reconduite pour la seconde fois à la tête du gouvernement allemand, ce malgré un score en demi teinte de son parti (CDU). Mais derrière le succès politique se dessine déjà une toute autre victoire, celle plus surprenante du « style » sur la communication. En effet, le positionnement marketing d’Angela Merkel est intéressant à décrypter tant la Chancelière a pris, ces dernières années, le contre-pied de la femme politique moderne, laquelle n’hésite pas, aujourd’hui, à faire de son corps un élément de différenciation. Un avantage concurrentiel. Autrement dit, une valeur ajoutée sur un marché dominé par une offre essentiellement masculine. Citons à titre d’exemple les cas d’école Ségolène Royal, Rachida Dati, Condolleeze Rice ou encore Cristina Kirchner qui ont su s’appuyer sur leur statut de « femme marque » et jouer de leur charme (source naturelle d’irrésistibilité) pour nourrir l’attractivité et gagner, à terme, l’adhésion de l’opinion. Notons que dans ce schéma, le discours non verbal est avant tout sensuel, émotionnel et esthétique. Dès lors, le contenant devient plus important que le contenu : le visage devient une promesse, le sourire et le corps un message. Chez la femme politique moderne en effet, le packaging (qui permet en marketing de positionner et clarifier l’offre) joue en définitive le rôle de média, attirant l’œil et éveillant le désir. Quand on sait que la politique est aussi une affaire de séduction, le ressort est imparable, d’où l’importance et le besoin de plaire en permanence donc de soigner et travailler le style vestimentaire, le regard, la voix, le sourire, la posture ou encore les gestes.

A l’inverse, le profil d’Angela Merkel est intéressant tant celui-ci ne s’inscrit pas dans cette logique stratégique et ne s’appuie pas sur les mêmes leviers de communication et de séduction. Pour peu, la Chancelière ressemblerait même à une femme politique dite « à l’ancienne » (serai-je tenté d’écrire) laquelle avait tendance, hier, à ne pas assumer sa féminité et, au contraire, à se masculiniser pour gagner en crédibilité aux yeux des médias et du grand public. Car l’originalité marketing de la « marque » Merkel tient justement à son positionnement « anti-marketing » : un parti pris qui n’intègre pas ou prou l’affect et l’émotionnel dans la communication ; refuse toute pipolisation de l’action politique (qui connaît à ce titre Joachim Sauer, son mari physicien ?) ; privilégie le fond à la forme ; préfère le terrain aux effets d’annonce ; évite la surexposition médiatique ; mesure les images et les formules ; rejette le spectaculaire et le sensationnel. En somme, un positionnement moins glamour. En définitive, moins « marketé » et moins « com » mais pour autant pas moins efficace.

Pragmatique, rationnelle, sérieuse (voire parfois austère), cette femme de 54 ans, divorcée et sans enfant, a su en effet imposer son « style » basé sur l’action dans la durée ; le contact direct et énergique avec les citoyens et l’obtention concrète de résultats. Soit, une stratégie de fond (menée avec constance et cohérence) qui a permis de crédibiliser son action politique, façonner une stature de leader et faire de la « marque » Merkel, à terme, une référence sur le marché politique : un gage de réassurance et de sécurité dans une séquence de crise, plus propice, en définitive, à l’émergence de ce type de profils. Mêlant autorité avec une certaine authenticité (renforcée par ses origines est allemandes), le style différenciant de Merkel étonne autant qu’il détonne. Une fois n’est pas coutume en effet dans notre société d’image et de spectacle, chez Merkel, l’idéologie l’emporte sur l’aspect émotionnel. La compétence remplace l’empathie. L’efficacité prime sur la séduction. L’expertise l’emporte sur le désir. Autrement dit, la politique prend le pas sur la communication. Dès lors, la Chancelière ne lasse pas. Ne s’épuise pas. Et ne se banalise pas. Mieux, son image de « marque » se nourrit de son action et donc se pérennise. En tous cas pour le moment. A suivre donc.
François B.

1 commentaire:

  1. Ce qui est intéressant, c'est qu'en France on dirait qu'il s'agit d'une "marque allemande" avec les a priori que l'on met derrière : solidité, sobriété, longévité et efficacité. Rien de dépasse, rien ne transparaît.

    Finalement, Merkel est le parfait cliché de l'allemande telle que l'on peut se la représenter à l'étranger. Et c'est peut-être cela son positionnement marketing.

    Moi j'aime bien ;)

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